10 avril 2017 0 7357 Vues

C’est quoi la maladie de Lyme ?

Qu’appelle-t-on  « la maladie de Lyme » ?

Introduction

Une épidémie mystérieuse aux allures d’une pandémie nous interpelle dans les médias et les controverses déferlent sur l’Internet. Elle porte le nom de « la maladie de Lyme ». Elle génère une souffrance qui divise le corps médical, rend perplexe les autorités sanitaires et la bataille entre les experts est portée jusqu’à dans nos tribunaux. Une abondante littérature médicale s’accumule depuis 40 ans, essentiellement en langue anglaise. On est d’emblée frappés par la dimension multidisciplinaire de cette maladie aux implications particulièrement vastes, ce qui la rend difficile à appréhender par nos spécialistes et les innombrables ramifications de cette affaire la rendent opaque aux nouveaux venus.

Nous avons voulu présenter ici cette littérature dans la médiathèque de Lyme Sans Frontières, afin de permettre aux chercheurs et aux usagers la possibilité de s’en faire une idée. Pour donner accès à cet ensemble très vaste, sans que le lecteur ne se perde dans des détails étrangers à sa propre spécialité, nous présentons ici, en guise d’éditorial, une esquisse volontairement squelettique qui permet d’appréhender le sujet dans sa globalité, tout en donnant accès en arrière plan aux publications plus spécialisées qui permettront à chaque chercheur d’approfondir le sujet selon ses propres intérêts.

Au fur et à mesure de vos questions et suggestions, cet éditorial sera réactualisé et les publications qui sont en lien seront enrichies.

Borrelia Burgdorferi

Le terme « la maladie de Lyme » fait référence à une épidémie mystérieuse apparue à Old Lyme dans le Connecticut, aux Etats-Unis dans les années 1970 : des troubles touchant simultanément plusieurs organes, dont des arthropathies infantiles et des troubles neurologiques.

Les études menées par Wilhelm Burgdorfer ont pu mettre en évidence un germe de la famille des spirochètes, une Borellia, proche du tréponème de la syphilis, responsable de cette épidémie de Lyme, et qui porte désormais son nom :  Borellia Burgdorferi. Transmis par la morsure de tiques, ce germe très fragile est sensible aux défenses naturelles de l’organisme et à des températures supérieures à 42°C ainsi qu’à de nombreux agents anti-infectieux. Toutefois, à la différence du tréponème, le Borrelia,  mise en situation défavorable, perd son enveloppe et ses caractéristiques immunologiques pour se constituer en kystes intracellulaires et en dépôt de bio film qui résistent aux défenses de l’organisme ainsi qu’à de nombreux antibiotiques.

A la phase aiguë de  primo infection, les spirochètes sont sensibles aux défenses immunitaires et aux antibiotiques, ce qui conduit à une guérison clinique. Toutefois, la forme intracellulaire et les bio films de la bactérie peuvent subsister indéfiniment à l’état latent et resurgir de façon furtive pour se propager vers l’ensemble des cellules de l’organisme : les muscles, le myocarde, le système nerveux central, périphérique et autonome, l’appareil génito-urinaire, les yeux, les articulations, les poumons, l’appareil digestif, la peau…

En changeant leur enveloppe et leurs caractéristiques immunitaires, ces germes sollicitent de façon répétée les défenses naturelles de l’organisme et les épuisent, ce qui conduit à un déficit immunologique, à des troubles auto-immuns et  à une négativation des marqueurs sérologiques. Suite à l’identification de ce germe par Burgdorfer, on s’est aperçu que la morsure de tique pouvait, selon les régions et les climats, et la nature des vecteurs, transmettre de façon simultanée de très nombreux autres agents pathogènes depuis un réservoir animal : ces anthropozoonoses vectorielles mieux connues des vétérinaires que des médecins, pouvant s’accompagner de nombreuses coïnfections par d’autres souches de Borrellia, diverses bactéries, virus et parasites.

 Comment contracte-t-on ces infections ?

Ces maladies réapparues de façon endémique en Occident depuis 1970, cette fois baptisées du nom nouveau de « maladie de Lyme », ont pris le corps médical au dépourvu. On a cru que ces fièvres récurrentes, autrefois décrites en Europe se limitaient maintenant  aux pays pauvres ou à des situations de crise. Il s’avère que ce sont en réalité des « maladies émergeantes » à travers le monde, qui se propagent très rapidement en prenant l’allure d’une pandémie.  Ainsi, l’épidémie apparue il y a 40 ans à Old Lyme remet à l’ordre du  jour une pathologie ancienne, qui pour des raisons encore incertaines, semble présenter la croissance la plus rapide parmi les maladies infectieuses à l’échelle mondiale, prenant l’allure d’une véritable pandémie multi microbienne, multi vectorielle, occasionnant des atteintes multi systémiques débilitantes.

On incrimine notamment la prolifération des tiques par le réchauffement climatique, l’urbanisation et l’interdiction en 1972 de l’usage agricole du DDT qui avait contrôlé les arthropodes depuis 1940. On évoque également divers facteurs environnementaux pouvant altérer les défenses immunitaires humaines, ce qui favorise la prolifération de la maladie, ou encore l’éclosion d’une infection  latente.

Quoi qu’il en soit des causes, le corps médical se trouve confronté à un défi diagnostique et thérapeutique de taille face à cette maladie ou ensemble de maladies. Non seulement les taux des anticorps peuvent devenir indétectables chez les malades immunologiquement épuisés, mais les tests sérologiques établis pour l’épidémie à Old Lyme sont très loin de couvrir les quelques 300 souches bactériennes et virales pouvant être impliquées à travers le monde, alors que  de nouvelles souches sont détectées de jour en jour.

De l’épidémie de Old Lyme au Syndrome d’Infection Multi systémique (SIMS)  

Outre la borréliose identifiée par Wilhelm Burgdorfer, on s’est vite aperçu que les tiques de Old Lyme étaient porteuses d’un véritable cocktail d’agents pathogènes (bactéries, parasites, virus) qu’elles pouvaient inoculer par régurgitation lors de leur repas de sang, pouvant donner lieu à autant de « co-infections » (viroses, babesioses, ehrlichioses, mycoplasmes, chlamydophila pneumoniae, rickettsioses, …) dont la guérison clinique apparente paraît habituelle chez un sujet en bonne santé. Nous sommes ainsi passés de la notion d’une maladie de Lyme par la b.burgdorferi ss, « sensu-stricto », à la maladie de Lyme due à un ensemble de diverses borrellia sl, « sensu-lato », pouvant se faire accompagner d’un cocktail de diverses coïnfections selon la région, le pays ou le vecteur, critères auxquels s’ajoute l’état de réceptivité de l’organisme hôte infecté.

La réactivation répétée des germes sur un organisme, à l’occasion d’une baisse des défenses naturelles, n’est pas sans conséquence sur le métabolisme cellulaire des divers tissus et organes atteints. Outre l’asthénie et les myalgies intenses et handicapantes, on peut voir apparaître des pathologies neurologiques, rhumatologiques, dermatologiques, neuropsychiatriques, ophtalmologiques, auditives, olfactives, cardiaques, pulmonaires, digestives, sexuelles et urinaires… pouvant conduire à des handicaps majeurs et au décès. Cet ensemble complexe dépasse très largement le cadre de l’épidémie initiale de la borréliose décrite par Burgdorfer, transmise par les tiques de Old Lyme. Les auteurs les plus expérimentés qui se sont consacrés à ces maladies depuis plusieurs décennies, préfèrent proposer un concept plus large : celui du Syndrome Infectieux Multi systémique (SIMS) où la borréliose ne serait que l’une des nombreuses composantes d’une réalité multi systémique et multi microbienne.

Les conséquences immunologiques des crises répétées, chacune comportant de nouvelles signatures antigéniques, laissent envisager un rôle dans l’apparition de pathologies complexes telles que les maladies auto-immunes, le cancer, la sclérose en plaques, la fibromyalgie, l’autisme, la maladie d’Alzheimer, les vascularités et les connectivites chez des patients pouvant ne présenter aucun des signes habituels d’inflammation ou d’infection qui auraient pu alerter le médecin : ni fièvre, ni polynucléose, ni les signes cliniques et biologiques rencontrés dans les infections aux germes habituels.

Au vu d’un bilan sanguin normal, un médecin qui ne serait pas  averti des caractéristiques trompeuses d’une infection « froide », exclut trop facilement toute hypothèse infectieuse. En outre, la mise en évidence directe par culture de ces germes réputés « fastidieux » s’avère particulièrement difficile : l’identification anatomo-pathologique nécessite des techniques complexes et des techniciens, ayant l’expérience des  procédés microscopiques directs tels que les gouttes épaisses, se font rares.

Révolution paradigmatique ?

Ainsi, un nouveau paradigme se présente à nous, défiant le postulat de Koch qui établissait une  relation de cause à effet entre un microbe et une maladie en 1890, lequel  a permis une victoire décisive contre un grand nombre de maladies infectieuses, à l’exception de ces germes intracellulaires fastidieux pour lesquels ce postulat s’avère inopérant. Ces infections intracellulaires peuvent impliquer plusieurs microorganismes à géométrie et à signature immunologique variables, d’action furtive – fastidieux à mettre en évidence – qui touchent simultanément plusieurs organes, qui produisent une kyrielle de pathologies polymorphes, pouvant simuler d’innombrables autres pathologies, désactiver la production d’anticorps qui assurent la défense et permettent un diagnostic sérologique, et qui déclenchent des processus auto-immuns.

On voit à quel point ces nouvelles constatations au sujet de ces maladies que l’on reléguait  à l’histoire, se heurtent à notre acquis culturel en matière de maladies infectieuses. Face à une telle complexité, les médecins, qui pour gérer la masse d’information scientifique qui leur parvient se spécialisent toujours d’avantage, ne parviennent plus à regarder les malades dans leur globalité mais « par le petit bout de la lorgnette ». Ne parvenant pas à faire le lien entre le grand nombre de troubles qui paraissent disparates, ils sont tentés de s’enfermer dans le déni, sous le parapluie de sociétés savantes qui leur dictent leurs pratiques par des attitudes et des procédés scientifiquement éprouvés, à l’exclusion de tout empirisme, ce qui étouffe l’esprit de recherche.

Pourquoi certains médecins contestent-ils la persistance de ces germes ?

Tous les médecins s’accordent à décrire les borrélioses comme comportant une phase primaire, secondaire et tertiaires à l’instar des infections par le tréponème pale de la syphilis, mais pour une raison difficile à comprendre, nombreux sont ceux qui nient la forme chronique de la maladie de Lyme qui implique la persistance des germes. Comme pour la syphilis, les spirochètes sont identifiables sous microscope à fond noir sont facilement détruits par la chaleur, les antibiotiques et les antiseptiques, mais contrairement au tréponème, les borrellia peuvent se constituer en kystes intracellulaires et en bio-films qui sont très difficiles à atteindre et à mettre en évidence par l’examen direct ou par culture qui nécessite des techniques longues et complexes sur des animaux de laboratoire ou sur des milieux vivants comme les œufs de poule embryonnés. De plus, la variété de germes pouvant être impliqués dans les SIMS ne cesse d’augmenter, notamment en raison des migrations. La faible fiabilité du dosage d’anticorps, la complexité et le coût de l’identification des antigènes par la technique d’amplification de l’ADN, et l’existence de porteurs sains font que le diagnostic de laboratoire est aléatoire et selon l’affirmation même des fabricants des tests, c’est le tableau clinique qui doit primer sur les tests biologiques, alors que les études médicales ont inexorablement conduit les jeunes médecins à abandonner les aléas de la clinique pour préférer la facilité et la supposée fiabilité des examens para cliniques.

La nature intracellulaire persistante de ces germes qui resurgissent de façon périodique conduit à un tableau clinique aléatoire qui a été largement documenté dans la littérature scientifique depuis l’antiquité. La persistance dans l’organisme des germes difficiles à mettre en évidence est très connue pour d’autres maladies telles que la tuberculose, l’herpès ou le zona. Suite à une guérison clinique, les malades peuvent rester des porteurs sains à vie et ne présenter de nouvelles manifestations épisodiques de la maladie qu’en cas de baisse des défenses naturelles. Cette persistance ou latence de ces germes qualifiée d’une « infection froide »  est même à la base de la vaccination par un vaccin vivant mais atténué qui confère une « immunité de surinfection », comme par exemple pour la vaccine atténuée qui protège contre la variole, ou le BCG contre la tuberculose.

On connaît les poussées herpétiques suite à une primo-infection, et le zona traduit le réveil d’une primo-infection lors d’une varicelle de l’enfance. A titre d’exemple, les redoutables endocardites et les septicémies à bas bruit et à hémoculture négative dues à Bartonella Henselae peuvent traduire la résurgence d’une maladie de la griffe du chat que l’on avait cru spontanément guérie. On redoute la difficulté de diagnostic et la gravité  des infections aux germes Gram moins qui évoluent vers un état de choc hypothermique, sans présenter le cortège des signes cliniques et biologiques habituels aux autres infections systémiques.

La nature latente des germes intracellulaires et leurs manifestations cliniques épisodiques leur ont valu le nom de « fièvres récurrentes » ou « relapsing fever », bien connues en milieu tropical. Au début du 20ième siècle, Dutton avait identifié dans le sang des porteurs sains des spirochètes de Borellia Duttoni. La maladie ressurgit en temps de crise, de famine, d’ exposition au froid et de guerre, comme pour le typhus exanthématique ou la fièvre des tranchées, dues à Bartonella Quintana qui a décimé l’armée de Napoléon en 1812.

Plus récemment, on a mis  en évidence des mécanismes de modification du métabolisme intracellulaire par le Tropheryma Whipplei, germe responsable de la maladie de Whipple, un SIMS rare aux manifestations très similaires à celles de la maladie de Lyme, nécessitant un traitement antibiotique au long cours ; ce germe fournit un modèle d’étude convainquant quant à la capacité de certains germes à ressurgir en survivant au sein même des macrophages.

Comment expliquer qu’il y ait tant de controverses et conflits autour de ces maladies ?

Ayant bénéficié d’un enseignement de plus en plus spécialisé, les médecins pratiquent une médecine d’organe et ont du mal à concevoir le malade comme un organisme dans sa globalité, les liens interdisciplinaires étant encore trop peu développés pour une prise en charge multidisciplinaire, à l’instar des réunions de concertation d’oncologie. Par manque de temps, les examens paracliniques prolifèrent aux dépens de l’observation clinique et de l’écoute des patients. Une panoplie d’explorations paracliniques est déployée à la recherche d’une preuve directe et objective, et faute d’une telle preuve, les « plaintes polymorphes » et subjectives non étayées par une preuve objective, sont qualifiées de simulation, d’hypochondrie, de trouble psychosomatique ou encore étiquetées tableau hypostasié ou syndrome de Münchhausen.

La nature très polymorphe mais également migratrice et furtive de ces symptômes, parfois disparaissant le temps d’attente d’une consultation, évoque très facilement une hypochondrie. Ce déni médical particulièrement douloureux pour les malades en quête d’un nom à mettre sur leur maladie, contraints de répondre « je ne sais pas » quand on les questionne à propos de la nature de leurs troubles, conduit à une errance médicale et à une surconsommation de consultations spécialisées et d’examens complémentaires coûteux. Rejetés par des praticiens mal informés qui les qualifient de « zombies », de « paresseux », en proie à des troubles  «  fonctionnels », d’ « hypochondriaques » ou de « simulateurs », ainsi que par leur entourage qui ne sait plus s’il faut les croire eux, ou  le médecin qui décrète que « c’est dans la tête » ce tableau conduit à une désinsertion sociale particulièrement cruelle.

Initiatives des patients et le besoin d’en tirer une analyse scientifique

Ainsi, à défaut de prise en charge adéquate, les patients trouvent un soutien moral auprès des associations de malades et sur les réseaux sociaux ou au sein de groupes de discussion ; ils accèdent ainsi à une abondante source de conseils et de littérature, et aux nombreux résultats de l’expérimentation empirique qui toutefois échappe à l’analyse scientifique qui aurait pu permettre une évaluation et conduire à des procédures de recherche fiables. Refoulés par les CHU qui sont pourtant dotés d’une infrastructure et de la capacité requise pour une mission d’enseignement et de recherche, ils apportent cette abondante information aux médecins libéraux, peu informés sur les SIMS et ne disposant pas du temps nécessaire pour examiner ces documents.

Menacés de sanctions en cas de dérives en dehors des recommandations et des AMM élaborées par les sociétés savantes, les médecins se retranchent prudemment sur leurs positions, se contentant d’un schéma de pratique médicale où la relation de soins est un contrat entre un médecin qui sait et qui agit en toute responsabilité, géré par une assurance maladie qui cherche à user des contributions publiques de façon parcimonieuse, face à un malade qui ne sait pas et qui doit apporter ses symptômes et observer les prescriptions, en s’abstenant de parasiter la consultation avec des hypothèses agaçantes au sujet d’une « maladie imaginaire attrapée sur Internet ».

Epuisement et dénégation : quels sont les risques de suicide chez ces patients ?

La souffrance morale de ces patients est d’autant plus cruelle que les signes objectifs sont rares et tardifs, et la spécialisation fait que chaque médecin ne les symptômes qu’à l’aune de sa propre spécialité, inattentif au caractère multi-systémique et labile des troubles qui devraient pourtant l’alerter. Confrontés à l’incrédulité de leur entourage et au rejet par les médecins qui ne sont pas formés pour reconnaître ces maladies émergentes, ou qui par crainte de sanction, s’abstiennent de soigner, en proie à la douleur physique et morale, ces malades désespérés et désocialisés  peuvent être ainsi conduits au suicide.

Le dogme médical contre des médecins qui soignent

A l’exception des rares services universitaires pris d’assaut et donc devenus inaccessibles et des services spécialisés onéreux à l’étranger, ces malades ne savent plus où se faire soigner. Mais là où le bât blesse, c’est que ce sont justement ces mêmes médecins universitaires, experts autoproclamés qui, après avoir refoulé les malades sans jamais en suivre un seul,  dictent les recommandations et les protocoles arbitraires ; ce sont eux qui interdisent aux médecins qui soignent et viennent en aide aux malades d’exercer leur art selon leur conscience. Le zèle à interdire une prise en charge de ces malades qu’ils surnomment les « zombies » est tel que les médecins libéraux et les collaborateurs de leur entourage universitaire qui se sont intéressés au problème sont réduits au silence par crainte de sanctions, une clandestinité qui interdit tout partage d’information ou de d’analyse épidémiologique pouvant contribuer à avancer la recherche scientifique.

Face à une pandémie multi vectorielle et multi microbienne, urgence de la  prévention et d’un dépistage efficace :

Les mesures de prévention contre les morsures de tiques sont urgentes et indispensables, mais l’on sait que les poux, les puces et d’autres vecteurs peuvent être également impliqués dans la transmission de ces agents pathogènes. De même, il convient d’identifier les circonstances déjà évoquées qui déterminent la prolifération des germes en latence. Ainsi, dans les SIMS, la tique est l’arbre qui cache la forêt.

On sait que les bartonelloses peuvent être transmises par la griffure, le léchage et les puces des animaux domestiques ; l’ehrlichiose est transmissible par voie placentaire et par le lait de la vache à son veau. Les indices s’accumulent pour faire suspecter une transmission interhumaine, notamment par les porteurs sains, par la voie transplacentaire, sexuelle, par le lait, la transfusion et la greffe d’organe. A l’heure actuelle, les candidats au don du sang aux USA sont dépistés plus fréquemment avec une babésiose qu’avec le VIH.

Ainsi, l’épidémie apparue il y a 40 ans à Old Lyme, pour des raisons complexes et encore incertaines, présente la croissance la plus rapide au monde parmi les maladies infectieuses, prenant l’allure d’une véritable pandémie multi microbienne et multi vectorielle conduisant à des atteintes multi systémiques débilitantes.

Face à cette véritable explosion, pour laquelle certains incriminent le réchauffement climatique ayant pu favoriser la prolifération des tiques, l’interdiction en 1972 de l’usage agricole du DDT qui avait contrôlé la prolifération des arthropodes depuis 1940, on évoque également divers facteurs environnementaux ayant pu altérer les défenses immunitaires et favoriser l’éclosion de la maladie depuis une forme latente.

Quelles que soient les causes de cette endémie, le corps médical se trouve confronté à un défi diagnostic, thérapeutique et épidémiologique de taille. Non seulement les taux des anticorps peuvent devenir indétectables chez les malades immunologiquement épuisés, mais les tests sérologiques établis pour l’épidémie de Old Lyme sont très loin de couvrir les quelque 300 souches bactériennes pouvant être impliquées dans les SIMS à travers le monde et de nouvelles souches sont détectées de jour en jour et les malades qui s’ignorent risquent de contaminer leur entourage.

Comment savoir s’il s’agit d’un SIMS ou de plusieurs autres maladies  simultanées ?  

Quand on a un marteau dans la main, dit-on, on voit des clous partout. La multiplicité des germes impliqués dans les SIMS ainsi que la diversité et la nature fugace des symptômes d’allure très banale provoqués par ces germes ont fait que pendant très longtemps les malades ont pu être traités de façon symptomatique pour de multiples autres pathologies. Il est tentant de proposer un diagnostic unique qui englobe tout ou de proposer l’outil thérapeutique que l’on a en main comme une panacée universelle. La  difficulté du diagnostic est grande et la variété de troubles pouvant être occasionnés par les SIMS ne doit pas conduire à un diagnostic hâtif au détriment d’autres maladies dont  le traitement pourrait être urgent.

C’est uniquement après avoir formellement écarté les autres diagnostics différentiels les plus usuels qu’une multiplicité de signes d’appel peut faire évoquer un SIMS. Il s’agit typiquement de malades ayant un gros dossier médical, qui ont transité par de nombreux spécialistes ayant chacun conclu que c’était « tout dans la tête ». Les praticiens qui suivent ces patients depuis plusieurs décennies s’accordent pour dire que dans l’état actuel de nos connaissances et de nos maigres moyens de diagnostic, il faut d’abord éliminer soigneusement tous les diagnostics différentiels  avant de se contenter d’un diagnostic de présomption clinique. A l’aide des questionnaires pour évaluer la probabilité d’un SIMS, on parvient à un score qui additionne les diverses manifestations de ce tableau polymorphe. Dans tous les cas, il convient d’accompagner et de soulager ces patients en suivant soigneusement leur sémiologie et sans toujours espérer obtenir un diagnostic bactériologique et sérologique de certitude.

Comme la Syphilis avant elle, la maladie de Lyme est une grande simulatrice, mais tout n’est pas pour autant un Lyme et il faut éviter le danger de passer à coté d’un diagnostic différentiel en évoquant abusivement une maladie de Lyme ou un autre SIMS.

Quel est le protocole de diagnostic actuellement reconnu par les sociétés savantes ?

Le protocole de détection proposé en France par une conférence de consensus en 2006 se cantonne à un petit nombre de borrélioses et se pratique en deux temps :

Un test ELISA de dépistage cherche des anticorps dans le sang ne prenant pas en compte toutes les souches qui existent en Europe. Ce test peu sensible serait faussement négatif pour 80% des cas, mais le consensus ne recommande le test de WESTERNBLOT de confirmation, plus sensible et plus onéreux, que si le test Elisa est revenu positif.

En outre, de nombreux résultats peuvent s’avérer faussement  négatifs, par exemple quand le test est pratiqué à un stade précoce après une morsure de tique, avant que les anticorps aient pu avoir le temps de se former, ou encore à un stade avancé, quand l’immunodéficience s’est installée et que les anticorps ne sont plus décelables. Selon une étude sérieuse, le chiffre avancé par les autorités en France de 25 000 à 30 000 nouveaux cas par an serait notoirement sous estimé. Avec des tests plus fiables, il faudrait escompter 5 à 10 fois plus de nouvelles personnes contaminées malades par an.

Du reste, poursuivis par des malades en raison de l’inefficacité de leurs tests, les fabricants des tests Elisa se défaussent en indiquant que c’est l’examen clinique qui doit orienter le diagnostic et que les tests immunologiques n’ont qu’une valeur indicative.

Quel serait l’avenir des sérodiagnostics ?

Ainsi, on peut voir des porteurs asymptomatiques mais séropositifs, et des malades faussement séronégatifs en errance médicale et non pris en charge par les spécialistes qui ne sont pas avertis de la valeur seulement indicative de la sérologie ni de la symptomatologie complexe et polymorphe des SIMS. En se fondant sur les seuls résultats sérologiques, ils peuvent réfuter ce diagnostic alors qu’en l’état actuel, seul le tableau clinique – après avoir soigneusement écarté les diagnostics différentiels – devrait prévaloir (Entretiens de Bichat, septembre 2012).

Les techniques d’identification directe des antigènes par amplification (PCR) qui sont couramment utilisées en pathologie animale par les vétérinaires ne sont pas disponibles en pathologie humaine et la culture et l’identification par microscopie optique et électronique et l’inoculation aux animaux de laboratoire sont encore peu utilisées.

Si ces maladies restent très peu enseignées aux étudiants en médecine dans les pays riches, les vétérinaires les connaissent très bien car l’impact économique des anthropozoonoses vectorielles sur les élevages est important. De toute évidence, les médecins, les vétérinaires et les chercheurs en agronomie devraient collaborer très étroitement pour endiguer ce fléau.

Outre les associations polymicrobiennes pouvant être en cause, les germes responsables des SIMS, en changeant d’enveloppe et de signature antigénique, entrainent un épuisement immunologique et un effondrement des taux d’anticorps, ce qui rend leur détection aléatoire. On est ainsi conduit à s’orienter plutôt vers la recherche d’antigènes spécifiques à chaque germe par PCR (amplification en chaine par polymérase) en identifiant son ADN. Or ces tests utilisés par les vétérinaires, sont encore très peu disponibles en pathologie humaine, et comble d’ironie, le recours au vétérinaire pour tester le sang humain est interdit. Ainsi, il est devenu plus facile de soigner le chien que son maître.

Comment peut-on traiter la maladie de Lyme ?

Il convient ici de distinguer deux cas particuliers :

– En premier lieu, il y a le cas d’une infection récente par morsure de tique produisant un érythème migrant typique qui, sans attendre une montée secondaire de taux d’anticorps, doit être traitée par une antibiothérapie énergique dont la nature et la durée restent à bien codifier. Faute d’un traitement efficace, les patients évoluent, à l’instar de la syphilis, de cette phase primaire vers une phase secondaire, puis tertiaire, comportant des lésions multi systémiques disséminées.

– En second lieu, il y a les patients dont la phase primaire a été négligée ou serait passée inaperçue, qui présentent une symptomatologie multi systémique, furtive et dont la nature fluctuante, polymorphe et souvent sans signe objectif précis, fait évoquer l’éventualité d’un SIMS en phase secondaire ou tertiaire. Il s’agit ici de ne pas traiter le problème à la légère en évoquant face à des plaintes polymorphes, un trouble psychosomatique.

Il convient en effet de distinguer d’une part entre les personnes asymptomatiques avec une sérologie positive qui, dans l’état actuel de nos connaissances, ne justifient d’aucun traitement ;  et d’autre part celles dont la sérologie est négative ou douteuse mais qui présentent un cortège de symptômes, ayant donné lieu à pléthore d’explorations infructueuses et pouvant évoquer un SIMS : celles-ci sont en attente d’un traitement. Chez ces patients, l’ expérience des dernières   décennies en zone d’endémie montre l’efficacité fréquente d’un traitement antibiotique au long cours, associé à d’autres moyens complémentaires pour soutenir leurs défenses naturelles et pour juguler une réaction caractéristique de Jarisch-Herxheimer sous traitement anti-infectieux qui doit être considérée comme pathognomonique d’une infection froide.

Doit-on utiliser des antibiotiques pour traiter les SIMS ?

Face aux aléas du diagnostic et la latence des germes chez les porteurs sains, nous sommes très loin de la stratégie en vigueur préconisée pour les infections habituelles, à savoir une antibiothérapie ciblée, à dose bactéricide et de courte durée.

Il ne s’agit plus seulement d’une simple lutte contre les microbes, également de déterminer dans certains cas la raison pour laquelle des microbes avec lesquels on a pu vivre en bonne entente depuis des décennies, à l’instar de la flore intestinale, seraient devenus pathogènes. On peut suspecter une baisse d’immunité ou des troubles métaboliques comme en étant des facteurs déclenchant. Il y a également des composants environnementaux tels que le froid, le stress et la surcharge en polluants qui peuvent avoir facilité l’éclosion de la maladie.

Alors que les protocoles d’antibiothérapie ont pu apporter des résultats très encourageants sur les SIMS, d’autres pistes thérapeutiques sont à poursuivre et les résultats empiriques accumulés doivent être évalués afin d’identifier les protocoles les plus prometteurs, sans nécessairement prétendre à une éradication complète des germes. Les protocoles ici se rapprochent plutôt du traitement des mycobactéries, de la tuberculose et de la lèpre, de celui des mycobactéries atypiques et du tropheryma whipplei. Ce sont là aussi des germes intracellulaires fastidieux, de culture difficile, mais dont le diagnostic a été rendu plus aisé par la recherche, et dont le traitement prolongé ne fait l’objet d’aucune controverse. Ce dernier germe, responsable de la rare maladie de Whipple, est plus facile à mettre en évidence que les borrellies, produit un tableau clinique de SIMS très proche de celui de la maladie de Lyme et dont le protocole d’antibiothérapie sur plusieurs années ne fait l’objet d’aucune critique.

Faut-il parler de syndrome post-Lyme ou d’une persistance des germes ?

Un autre aspect du problème est que les SIMS ne se soignent pas comme les infections microbiennes banales car après une amélioration par une cure, les symptômes peuvent revenir et certains auteurs réfutent la notion d’une maladie chronique pour évoquer les séquelles de la maladie.

Face à la persistance des symptômes après une antibiothérapie de courte durée, la tentation a été grande de dire que des germes aussi fragiles que les spirochètes n’ont pas pu résister, une hypothèse qui rejette la réalité indéniable de la présence de germes identifiés dans le courant sanguin et leur persistance sous forme de kystes et de bio-films.

Or, si  la forme vivace des germes est très sensible aux antibiotiques, suite à une agression, les germes perdent leur enveloppe pour subsister sous la forme d’un bio film ou de kyste intracellulaire, résistants aux antibiotiques et prêts à libérer des spirochètes dès que les conditions deviennent favorables. En outre, le tropisme des germes pour le système nerveux central les met à l’abri des antibiotiques qui traversent mal la barrière hémato-méningée.

L’expérience montre que de nombreux malades sont améliorés de façon spectaculaire par les antibiotiques au long cours prescrits de façon séquentielle, visant de manière empirique les différents germes pouvant être responsables, souvent au prix d’une exacerbation passagère et parfois très intense de leurs symptômes, appelée réaction de Jarisch-Herxheimer qui fait suite à la libération des toxines des bactéries détruites. Ces mêmes réactions d’Herxheimer peuvent conforter l’hypothèse diagnostique et témoigner de l’efficacité des anti-infectieux et doivent conduire à moduler les doses pour en limiter la gravité.

Divers protocoles empiriques sont à l’essai, alternant les anti-infectieux et les antiparasitaires, et des témoignages de malades s’accumulent sur leur efficacité. Toutefois, faute d’une attention suffisante de la part des sociétés savantes et de budgets nécessaires à leur exécution, ces études souvent bien conduites et documentées avec leurs résultats très prometteurs, n’ont pas reçu l’attention qu’elles méritent pour être incluses dans les consensus, recommandations et les AMM et les nouvelles études restent de réalisation hasardeuse face aux poursuites engagées contre les praticiens qui acceptent de prendre en charge ces malades.

Hormis les antibiotiques, de nombreux autres protocoles sont à l’étude, dont l’innocuité et l’efficacité restent à établir et qui visent soit la destruction des germes, soit le renforcement des défenses naturelles de l’organisme à leur égard, ou qui cherchent à rendre plus tolérables les réactions d’Herxheimer. On peut entre autres citer de façon non exhaustive le sauna à infrarouge, les cures d’hyperthermie, le caisson d’oxygène hyperbare ainsi que divers traitements phytothérapiques dont les résultats prometteurs méritent une évaluation plus poussée.

L’usage des antibiotiques favorise-t-il la résistance des germes ?

Ainsi, à l’instar de la tuberculose il y a un siècle, l’approche empirique et expérimentale est souvent la seule actuellement possible à l’égard des SIMS. Il faut reconnaître que tous les procédés scientifiquement validés aujourd’hui, sans aucune exception, sont obligatoirement passés par un stade d’empirisme, de recherche et d’évaluation conduisant à une accumulation progressive de données scientifiques dont l’analyse a permis des protocoles cohérents ayant donné lieu aux recommandations faites aux médecins. Cette attitude d’empirisme va à l’encontre de nos règles de prescriptions actuelles en matière de maladies infectieuses, car pour éviter la résistance aux antibiotiques, les médecins ont appris à en user avec parcimonie, à doses efficaces, sur une courte durée et seulement après l’identification formelle du germe et de sa sensibilité.

Or, face à la souffrance et le désarroi des malades, cet argument scientifiquement valide, reste éthiquement et humainement inapplicable. De plus, on oublie que la résistance microbienne aux antibiotiques ne s’acquiert pas seulement dans l’organisme des patients, mais surtout dans la nature où sont présents les antibiotiques excrétés sous forme active vers les fosses septiques,  dans l’eau potable, dans les aliments et les fosses à purin après leur utilisation massive dans l’industrie agroalimentaire.

C’est pour cette raison que toute démarche de recherche et d’apprentissage requiert qu’un  traitement empirique soit soumis à un protocole rigoureux après le consentement éclairé des patients et l’approbation par les instances d’éthique afin d’aboutir à une analyse des résultats scientifiquement exploitable pour conduire le cas échéant à une modification des pratiques.

Comment coordonner le travail de plusieurs spécialistes ?

La multiplicité des atteintes au cours d’un SIMS nécessitera la coopération entre plusieurs spécialistes. Il sera sans doute du ressort du médecin de famille de coordonner la prise en charge multidisciplinaire des divers troubles neurologiques, rhumatologiques, ORL, pulmonaires, cardiaques, digestifs, ophtalmologiques et psychologiques en s’assurant de la collaboration entre des spécialistes ouverts à cette hypothèse  diagnostique et alertés sur la nature trompeuse de la pathologie multi systémique qui sous-tend les multiples manifestations cliniques.

Quel est le recours des malades en cas de refus de prise en charge appropriée ? 

Il est tout à fait honorable pour un médecin de dire qu’il ne sait pas, mais le code de déontologie ne lui permet pas pour autant de laisser le malade à l’abandon. Le défaut de prise en charge de ces patients, les propos désobligeants, le déni, le sarcasme et le mépris, constituent une faute déontologique et pénale qui en aucun cas ne peut être admise. Si les praticiens libéraux, qui ne disposent pas toujours d’une infrastructure et du temps nécessaire pour conduire des protocoles de recherche, adressent ces patients aux CHU, ces structures qui sont dotées d’une mission d’enseignement et de recherche ne peuvent en aucun cas se dégager de leur responsabilité.

Avec l’aide des services juridiques des associations de malades, il conviendra de protéger leurs droits et de les assurer d’un accès aux meilleurs soins possibles et d’informer rapidement les médecins de la réalité des SIMS. Les services des CHU doivent être mobilisés pour favoriser la recherche et soutenir les médecins impliqués auprès de ces malades, en préconisant auprès des experts et des tribunaux une compensation pour les praticiens qui ont été injustement poursuivis.

Où en est la recherche ?

Les grands progrès de la médecine au cours de ces dernières décennies reposent sur une médecine fondée sur des preuves , l’ « evidence based médicine », et les praticiens avancent, encadrés par des directives et protocoles dictés par des consensus établis par les sociétés savantes.

Or, sans exception aucune, les protocoles actuels, qui ont été scientifiquement et statistiquement validés, reposent sur l’évaluation d’un apprentissage apporté par l’empirisme d’autrefois. Aucune société savante ne peut donc s’ériger en expert et dicter des directives sans fonde son avis sur des études approfondies et une évaluation clinique des soins.

Pourtant, en s’inspirant de l’avis non étayé des sociétés savantes, des services universitaires se désengagent de leur mission d’enseignement et de recherche et refoulent ces patients vers une prise en charge symptomatique par les médecins du secteur libéral, sans apporter à ces derniers un protocole de suivi.

Ceux-ci procèdent par tâtonnement et leurs échecs et leurs réussites empiriques restent anecdotiques, ne pouvant pas être correctement exploitées pour aboutir à des résultats d’étude scientifiquement validées et éthiquement approuvées.

Des démarches de recherche initiées par les CHU devraient inclure les médecins généralistes et les spécialistes libéraux, chevilles ouvrières de notre système de santé, en les associant à des protocoles d’études multicentriques, tout en leur apportant les outils de recherche et d’analyse pouvant être gérés par les universitaires. Le vaste corpus d’information séméiologique et pharmacologique qui circule dans les forums sur Internet, là où les malades et les praticiens partagent leurs expériences et la documentation qui s’accumule depuis 40 ans, reste à être exploité, en étant analysé, réfuté ou validé.

Les chercheurs vétérinaires et agronomes qui sont bien plus avancés que les médecins en matière d’ anthropozoonoses, devront être de toute évidence associés à une telle  démarche. Des protocoles d’études prospectives et multicentriques sérieuses, appuyés par des prélèvements biologiques, bactériologiques et anatomopathologiques encore peu utilisés permettront de systématiser les apprentissages en les centralisant au sein d’un observatoire pluridisciplinaire et national des anthropozoonoses.

Les patients doivent être conscients qu’en demandant une autopsie systématique pour eux-mêmes et pour leurs proches, ils peuvent contribuer à une meilleure connaissance de la réalité complexe de cette maladie et ainsi conduire les médecins, qui seront devenu conscients que leur diagnostic sera confronté à une évaluation objective, à considérer ces troubles avec une plus grande attention.

Parmi les outils précieux pour aborder des réalités aussi complexes se trouve l’outil informatique. Grâce à des observations soigneuses de la symptomatologie clinique, les praticiens peuvent enrichir progressivement la base de données d’un système expert qui pourra apporter une précieuse aide au diagnostic en proposant la probabilité de diverses hypothèses. Conduire de telles études requiert un financement qui sera disponible lorsque les autorités sanitaires cesseront de considérer ces maladies comme des maladies imaginaires, mais comme une menace émergente en matière de santé publique.

Il est ainsi urgent de mettre fin à tout comportement dogmatique et cynique qui désavoue les malades, stérilise la recherche et étouffe le raisonnement scientifique.

Claude Bernard (1813-1878) soulignait la nature ouverte de la médecine expérimentale, une médecine qu’il décrivait comme étant « par nature une médecine antisystématique et anti doctrinale », en vantant « l’esprit philosophique… qui doit régner… sur toutes les connaissances humaines… », afin d’entretenir  « … une sorte de soif de l’inconnu et le feu sacré de la recherche qui ne doivent jamais s’éteindre chez un savant » car « … Sans cette excitation constante donnée par l’aiguillon de l’inconnu, … il serait à craindre que le savant ne se systématisât dans ce qu’il a acquis ou connu. Alors la science ne ferait plus de progrès et s’arrêterait par indifférence intellectuelle, comme quand les corps minéraux saturés tombent en indifférence chimique et se cristallisent. » « … Cette union solide de la science et de la philosophie est utile aux deux, elle élève l’une et contient l’autre… »

(Claude Bernard, Introduction à l’Etude de la Médecine Expérimentale, Flammarion (1966), p 305-309)

Dr Farhan Yazdani (Chirurgien des Hôpitaux,  Capacité de médecine en situation de catastrophe, médecine tropicale, éthique médicale, expert près des tribunaux)

9 mai 2017

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